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San Anton, sur le Camino Francés

19 août 2011 : les immenses solitudes apaisantes de la Haute Marne sur de superbes chemins, sans voitures, et même sans tracteurs pendant des heures. Le paradis pour un pèlerin-randonneur ! Vers 16h, j'arrive à Louesme, commune d'une centaine d'habitants, qui n'a aucune possibilité d'hébergement. Le maire m'oriente vers un agriculteur qui, pour des raisons de santé, ne peut m’accueillir. Je demande à un monsieur d'un certain âge où est le centre équestre. Quand il apprend que je vais vers Compostelle, il m'a offert l'hospitalité sans hésiter. Agé de 80 ans, seul, Hubert (il m'a demandé de le prénommer) a du mal à se déplacer. Sa porte est toujours grande ouverte : "je sens si je peux faire confiance" m'a-t-il confié. Après l'apéro chez son copain de 87 ans, il m'a préparé un excellent dîner ! C'est tout simplement incroyable. Je n'ai rien à ajouter. C'est ça aussi l'esprit du chemin !
20 août 2011 : étrange impression ce matin dans les rues quasi-désertes de Louesme, au milieu de la petite rue au centre du village. Pas âme qui vive. Seules les hirondelles qui volaient bas occupaient l'espace. Je me demandais si Hubert n'était pas le seul habitant qui aurait accepté de m'héberger ! Nous nous sommes dit au revoir hier soir (il ne se lève pas avant 9 - 10h). Il avait les larmes aux yeux. "J'ai beaucoup souffert dans ma vie", a-t-il ajouté en me serrant la main. Ce matin, en entrant dans la cuisine, tout était prêt pour préparer mon petit déjeuner (même les allumettes sur la gazinière !). Je lui ai laissé un petit mot, j'ai refermé la porte délicatement, laissant derrière moi un homme chargé d'histoire, de lourds secrets ... mais un homme de cœur. Merci, merci, Hubert.
Août 2019 : en revenant de vacances, je suis passé par Louesme pour saluer Hubert. Malheureusement, il avait quitté son village pour un Ehpad. Alors que ces établissements payent un lourd tribut à l’épidémie actuellement, j’espère qu’il est entouré de personnes bienveillantes et généreuses qui sachent l’entourer, l’aider, l’écouter comme il a su le faire sur mon chemin de Compostelle.


Jean-Paul Belvoix



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